Dédédédéchire sa race !

Guess who's back?! Aucune idée? Inio ASANO!! Mais si, le gars qui a fait Solanin, ou encore Bonne nuit Punpun! Voilà, tu vois qui c'est maintenant? Et bah il est de retour avec une nouvelle série, ça s'appelle "Dead Dead Demon's Dededede Destruction" ("DDDD" pour les intimes), et c'est aussi barré que son nom le suggère... mais pas con pour autant! Enfin bref, on va voir ça tout de suite!

L'apparition soudaine dans le ciel de Tokyo d'un vaisseau extraterrestre semblait marquer la fin du monde. Pourtant trois années se sont écoulées sans réelle invasion. Sous l'énorme masse métallique, symbole de désespoir, l'histoire d'amitié entre deux lycéennes, Kadode et Ôran, continue de s'écrire... Oui, cette fois-ci je vous ai balancé le pitch de quatrième de couverture plutôt que d'en réécrire un à ma sauce. Pourquoi? Parce que DDDD est une oeuvre très difficile à cerner tant elle se montre complexe. Derrière une forme assez simple avec une trame principale d'amitié plutôt classique, DDDD cache une profondeur encore difficilement accessible pour le moment. Comme c'est écrit sur le bandeau promotionnel, cette nouvelle série se présente comme "une allégorie moderne décryptant le société japonaise post-Fukushima". Une oeuvre qui risque donc de nous faire gagner des neurones à première vue. 

À la lecture de ce premier tome nous nous retrouvons assez vite dans une situation particulière. L'histoire se présente assez simplement comme une histoire d'amitié plutôt agréable à suivre. Les deux héroïnes, deux lycéennes au quotidien monotone, n'attendent rien d'autre que de voir quelques chose d'extra-ordinaire arriver pour chambouler leur quotidien. Leur relation à elles-deux, mais aussi leurs évolutions individuelles se présentent à la lecture comme agréables à suivre, mais cachent quelque chose de bien plus profond, suggéré par ce contexte si particulier. Avec cet énorme vaisseau qui plane au dessus de la ville comme une menace à laquelle tout le monde s'est habituée, ces conversations anodines prennent un tout autre sens. Nous voyons vite que rien n'est laissé au hasard par Inio ASANO, autant graphiquement que scénaristiquement, chaque petit élément, chaque trait, chaque parole semble receler d'une signification particulière et vient ouvrir une nouvelle dimension à l'oeuvre, donnant pour l'instant un côté mystérieux et intriguant à ce manga dont on n'a l'impression de ne pas encore tout cerner.

Graphiquement, Inio ASANO innove encore une fois dans cette nouvelle série. Ce premier volume en mains, nous avons l'étrange impression de redécouvrir le manga et les particularités de cet art. DDDD nous rappelle que les dessins dans le manga ne sont pas juste là "pour faire joli" ou "pour que ça soit plus facile à lire", comme le pensent sûrement tes grands-parents en te voyant feuilleter ta japoniaiserie. Ils sont là pour nous raconter une histoire. Pour installer cet univers très particulier pesant sur le quotidien de Kadode et Ôran, ASANO fait usage de l'outil graphique de manière très ingénieuse voire novatrice. Tout au long de l'oeuvre, ASANO souligne cette atmosphère lourde et oppressante, plaçant dans le décors des hiragana aux effet très particuliers. Les hiragana sont un des système d'écriture japonais servant à exprimer des sons ou onomatopée sous forme syllabique; on en retrouve pas mal en arrière plan dans les mangas. Or, ici le mangaka s'amuse à mélanger différents caractères pour créer graphiquement de nouveaux sons inexistants, apportant une atmosphère particulière à l'oeuvre. De plus, ces hiraganas sont placés de façon à intervenir plus ou moins dans le dessin, ils ne sont pas de simples arrières plans mais des caractères flottant dans le ciel, donnant l'impression que les personnages peuvent eux aussi les voir. Outre cette particularité, c'est globalement les choix visuels de ASANO qui font la particularité de son oeuvre. Nous pourrions en parler pendant des heures tant il y a de choses à dire, mais ce côté hyper-réaliste et quasiment photographique (à vrai dire le mangaka s'est inspiré de photographies pour créer les décors donc ceci explique cela) étoffe un scénario croulant sous le poids de l'énorme masse de métal qui surplombe la ville de Tokyo. 

 

Inio ASANO use finalement de cet énorme vaisseau pour créer une situation particulière. Cette histoire aux abords de  "tranche de vie" est assez régulièrement renvoyée à sa juste valeur par des plans soulignant l'immensité de la menace qui pèse sur chacun des personnages. Il est aussi très intéressant de voir les différentes réactions à cette menace dans les médias, très présents dans l'oeuvre pour souligner l'inaction des différents partis dans cette affaire qui reste en statu quo depuis maintenant 3 ans, et réagissant finalement que lorsqu'il se passe quelque chose. C'est d'ailleurs dans cette facette assez critique sur la société que ressort la partie "allégorie post-Fukushima". Nous voyons facilement qu'au delà d'un divertissement, DDDD est une authentique critique sociale.

Bref, Inio ASANO nous régale autant sur le plan intellectuel qu’émotionnel dans cette nouvelle oeuvre. Il signe encore une fois une histoire qui devrait être passionnante et déjà dotée d'un fond intriguant qui se creusera sans doute au fil des volumes. DDDD s'annonce comme une série à commencer de toute urgence et à suivre de très près. De plus, si vous hésitez encore, n'oubliez pas que les éditions Kana nous proposent toujours les tomes 1 de leur nouvelles parutions pour 5.95€ seulement (ouai bon c'est que 1€ de réduction mais tu va pas cracher dessus hein), en guise de cadeau pour leurs 20 ans. Alors on sort du lit, on met un pantalon, on va voir son libraire en et on lui demande le tome 1 de DDDD!

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Equipage en place depuis 2011  -  Hébergé par Overblog