La Planche : Akata the return !

Ehehehehe, est-ce qu'on tenterait pas un nouvel épisode de #LaPlanche ?! Pour l'occasion, c'est avec le tout premier éditeur qui a inauguré cette rubrique que nous avons rendez-vous, sauf qu'il ne s'agit plus de la même personne, il s'agit des éditions Akata !!

 

 

C'est l'ami Bruno PHAM qui vient répondre à nos questions cette fois-ci !! Si vous le permettez, débutons sans plus attendre ?! 

 

1. Eh bien, eh bien, visiblement il y a eu du changement à la tête d'Akata la dernière fois. Peux-tu nous faire un petit topo de la situation actuelle ? 

 

En réalité, depuis la création d'Akata, c'est Sylvie Chang qui en est la gérante. Aujourd'hui encore, c'est Sylvie qui assure la gérance de l'entreprise. En ce sens là, rien n'a changé. Simplement, il est vrai qu'on a moins tendance à mettre en avant le travail de l'ombre. Et pourtant, une bonne gestion, c'est crucial à la vie d'une entreprise, surtout d'une TPE. Sylvie a toujours eu beaucoup de flair et d'instinct, quand il a fallu prendre certaines décisions cruciales (comme déménager les locaux de l'entreprise, par exemple). Mais elle ne se met pas en avant, donc, les gens ont moins conscience de tout ce qu'elle a apporté à Akata (et même à Tonkam à l'époque) depuis toujours. Pour tout le reste, cela relève de la sphère du privé, et cela doit rester de cet ordre. Nous sommes dans une société qui a tendance à trop exhiber ce qui ne devrait pas l'être. Les « stars », les politiques, beaucoup de gens ne font plus preuve de retenue et de pudeur. Notre catalogue invite à se recentrer sur l'essentiel, et on préfère laisser nos livres exprimer ce qu'ils ont à exprimer. Nous ne sommes, dans le fond, pas grand chose : de simples passeurs.

 

 

2. On est en début d'année, peux-tu revenir pour nous sur l'année 2018. Bonne ou mauvaise ? On est comment chez Akata ?

 

L'année a été excellente, à plein de niveaux. Si on parle chiffres, parce qu'il paraît que c'est ce que les gens veulent, nous avons augmenté notre chiffre d'affaire d'environ 5%, alors que nous avons diminué nos publication de XXX%. Eh oui, c'est donc une très belle prouesse ! Quand je lis des analyses de part de marché, je trouve souvent que les chiffes sont mal analysés, où parfois volontairement mal expliqués par des éditeurs. Parler de parts de marché, en soi, ça ne veut rien dire. Il faut relier ça avec le nombre de nouveautés à l'année, la part de nouveautés qui s'installent, et voir comment vit le fonds de catalogue.

Du coup, si je reviens à notre bilan 2018, à part « Voyage au bout de l'été », tous les mangas semblent avoir rencontré leur public. C'est un peu tôt pour en être certains, sur les séries lancées en fin d'année, mais le constat global est que nous n'avons pas eu de gros « flop », d'un point de vue commercial. En terme de nouvelles séries, Eclat(s) d'âme, GAME, Entre nos corps et Magical Girl Holy Shit sont nos trois meilleurs lancements. Whispering n'est pas loin derrière. Ce qui est super, c'est que c'est vraiment complètement à l'image de notre catalogue ; son aspect sociétal, son aspect shôjo/féminin, son aspect WTF ?!. Sinon, des titres plus anciens continuent à très bien se vendre, que ce soit orange, Le Mari de mon frère, ou même Good Morning, Little Briar-Rose qui a fait une montée en flèche dans le courant de l'année.

Mais personnellement, le bilan que je tire, c'est quelque chose de très positif humainement. Avec une nouvelle fois une énorme reconnaissance, vis-à-vis des lecteurs qui nous soutiennent, des libraires qui nous font confiance, et aussi à tous ceux qui travaillent dans l'ombre avec nous. Cette confiance qu'on place en nous, c'est unique, et précieux. En même temps, ça fait peur… La peur de ne pas décevoir, de devoir continuer dans cette direction. Le fait est que plus on réussit, plus la barre est haute, et plus on risque de décevoir… D'une année à l'autre, la pression monte !

 

 

3. Il y a déjà de belles annonces pour ce début d'année chez vous, avec toujours cette volonté de sortir des sentiers battus. Est-ce que ça fait partie en quelque sorte de la "charte" Akata ?

 

On ne cherche pas nécessairement à sortir des sentiers battus pour sortir des sentiers battus. Ça serait une démarche complètement artificielle, et qui, je crois, sonnerai assez faux au final. Par contre, notre volonté, c'est de faire les choses sincèrement, d'une manière qui nous ressemble. Peut-être que la démarche « commerciale » normale, c'est de chercher à « comprendre le marché, pour s'y conformer ». Nous, on trouve des titres qui nous plaisent, qu'on aime, qu'on a envie de porter, et on se demander plutôt « comment atteindre un public pour ce titre ». Si on caricature, à l'échelle des individus et du groupe… Quand on arrive dans un groupe humain, on peut se dire : est-ce que pour m'intégrer, je cherche à me conformer à la « norme », ou alors pour m'intégrer, je préfère exprimer qui je suis avec sincérité ? Notre choix, c'est le second : être nous-mêmes. D'une certaine manière, c'est d'ailleurs ce qu'exprime une partie de notre catalogue. C'est peut-être ça qui fait qu'on donne l'impression de chercher à sortir des sentiers battus ?

 

4. Peux-tu justement un peu nous parler des nouveautés à venir. En février, on aura " La Métamorphose"  ou "Gereksiz" par exemple ?

 

Pour le coup, je ne sais pas si c'est surprenant en soi, car sur ces deux titres, on se « contente » de continuer un travail de fonds qu'on a engagé sur les deux auteurs. Mais ce qui m'amuse beaucoup, c'est de proposer ces deux ouvrages en même temps, car ils fonctionnent parfaitement en miroir. Les deux parlent de l'être humain, de sa monstruosité, de son rapport à l'autre, via un processus de transformation. Donc, ça fait complètement sens de les publier en même temps. Et on aime beaucoup mettre des micros clins d'oeil entre nos titres. La couverture de « La Métamorphose » évoque celles de « Saltiness », qui est du même auteur que « Gereksiz ». La boucle est bouclée !

 

 

5. On voit aussi des titres plus "engagés" comme "Adieu mon utérus" qui traite de sujet hautement important tout comme "Celle que je suis". Pourquoi s'orienter sur ce genre de titres ?

 

La réponse est dans la question : parce que ce sont des sujets importants. Que dire d'autre ? Ca rejoint ce que j'ai dit avant : on fait le choix d'être nous-mêmes, on ne sait pas faire autrement. Il suffit d'ouvrir objectivement les yeux, de regarder la société autour de soi, d'observer les individus qui nous entourent. Et tout est là : la souffrance au quotidien, le besoin d'autrui, d'attention à l'autre. Quand on parle de « l'autre », il y a deux manières de le faire. Le faire en exacerbant les différences, ou en parlant de ce qui nous relie. On est sur la seconde position, qui pourtant ne signifie pas de nier les spécificité de chacun, au contraire. Au final, parler du quotidien, d'un quotidien bien vécu, bien réel, c'est essentiel. C'est une base pour construire un dialogue. Sans dialogue, sans l'effort de la compréhension de l'autre, on ne peut aller nulle part. Ca donne peut-être l'impression que je ne parle que de Celle que je suis. Mais c'est pareil, sur Adieu, mon utérus. Je n'ai même pas besoin de m'étendre sur la question du « cancer ». Mais si je relie à ce que j'ai dit juste avant : comprendre le parcours d'un.e malade, ce qu'iel ressent, pour être là, présent au bon moment. Je crois que la fin du titre résume très bien ce que je dis, quand l'autrice dit : « Je vais finir en disant ce que j'aurais aimé qu'on me dise ». Voilà, c'est ça : peut-être que dans son parcours à elle, les gens n'ont pas été assez attentifs à son ressenti. Mais être attentif à l'autre, c'est la base.

 

6. "Le secret de l'amitié" débarque aussi, un petit one-shot avec au scénario Kazune KAWAHARA. Un one-shot shojo de l'hiver, pour nous réchauffer le coeur ?

 

Je ne sais pas si on peut parler de « réchauffer le coeur », ça fait très cliché quand même… Toute l'idée de ces « One-shot Shôjo », c'est de montrer la diversité de ce secteur éditorial, et que justement, on n'est pas exclusivement dans de la romance. Tout en proposant une diversité d'autrice aux styles graphiques et ambiances différentes, à des instants différents de leur carrière. En tout cas, l'amitié, justement, est un sujet tellement important du shôjo manga. Au moins autant que l'amour, en réalité. C'est le sujet de ce titre, même si l'amour y trouve aussi sa place. En tout cas, ce titre, c'est surtout une parfaite porte d'entrée pour faire découvrir Aiji Yamakawa. Kazune Kawahara, bien sûr, est connue ici. Mais on avait Aiji Yamakawa dans « nos cartons » depuis si longtemps. Pouvoir la publier comme une « Mari Okazaki », avec une sorte de collection aux couvertures similaires, c'était un vieux fantasme. Elle a vraiment un style unique à elle, et a fait partie des figures incontournables du shôjo manga moderne « arty ». Parce qu'elle dessine à son rythme, sans céder à la pression commerciale éditoriale, elle n'a pas « explosé », en terme de ventes. Elle est trop irrégulière pour être aux commandes d'une série fleuve. Mais il n'empêche qu'elle bénéficie d'une aura toute particulière. Quelque part, on peut dire que graphiquement, et en terme d'ambiance, son approche du shôjo se rapproche de celle d'Ichigo Takano. Ca se ressent bien sur la couverture, je pense. Bref, c'est vraiment un grand plaisir de pouvoir enfin la présenter en français ! J'espère que les lecteurices seront content.es.

 

 

7. Est-ce qu'on peut placer un petit mot sur votre collection de roman ? Comment qu'on est de ce côté-ci ? C'est satisfaisant ? Le public est au rendez-vous ?

 

C'est encore un poil tôt pour tirer un bilan définitif. Ce qui est certain, c'est que tout est encore nouveau, et en tâtonnement. Et ce qui est nouveau, ça prend forcément du temps. Les tomes 1 et 2 de la saga orange sont actuellement en rupture de stock. Ils vont bientôt être réimprimé, c'est plutôt bon signe ! Après, on a beaucoup décalé les projets romans. A l'origine, Mawaru Penguindrum devait être lancé en 2017, mais après analyses et retours, le projet a été décalé en 2018, avec la création du label Young Novel. C'est maintenant, sur 2019, que les choses vont se jouer. J'attends quelques validations pour faire des annonces, mais on a des très très belles choses à venir. Loin de l'idée d'oeuvres de « licence ». On va aller vraiment vers des créations originales, et je suis très excité à cette idée. Ca va vraiment ressembler à « du Akata », et j'ai hâte de pouvoir partager tout ça !!

 

8. Par ailleurs quid des séries comme "Prisonnier Riku" qui va prochainement dépasser la trentaine de tome tout de même ? Ou "Magical Girl of The End" qui a trouvé sa conclusion, est-ce qu'on va revoir de longues séries prochainement ?

 

Pour ces deux titres-là, on les a signés à des moments où il y avait beaucoup moins de tomes disponible. De mémoire, Prisonnier Riku n'était que vers les 12-13 tomes. Magical Girl of the End seulement à 3. Donc, on ne pouvait pas savoir à quel point ces titres allaient durer. Donc, c'est impossible de répondre à cette question avec certitude, car on signe de nombreuses séries qui ne sont pas finies, et certaines pourraient durer. Ce qui est certain, c'est que de se lancer a postériori dans une série qu'on sait déjà longue, c'est quelque chose qui mérite nécessairement réflexion. Car on reste une petite équipe, et qu'on veut pouvoir proposer des choses variées. Avoir une série qu'on sait déjà dépasser les vingt tomes (par exemple), c'est signer pour plus de quatre ans de publication. Et comme on n'est indépendant depuis cinq ans « seulement » (ou déjà, que le temps passe vite), mine de rien, ça paraît un peu abstrait encore, de pouvoir s'engager sur une telle durée. Pour le moment, on n'a donc pas de série qu'on sait longue dans nos tiroirs. Mais peut-être que certaines qu'on a déjà signées dureront plus longtemps qu'on ne l'aurait imaginé ? On verra bien !

 

 

9. Que rêverais-tu d'ajouter au catalogue Akata ? Titres ou auteurs. 

 

Tous les titres de Shûzô Oshimi que les éditeurs japonais ont préféré confier à d'autres éditeurs. Innocent, aussi, et Le Requiem du roi des roses. Mine de rien, ce sont deux auteurs « Akata », et ces deux séries se répondent tellement bien. Leurs thématiques, c'est évident, auraient complètement eu leur place dans notre catalogue, et j'aurais aimé pouvoir les assumer de manière bien plus revendicative. Ils n'ont pas le succès et la visibilité qu'ils méritent. Que j'en suis triste…

 

 

10. L'heure est venue de nous séparer, je te laisse le mot de la fin, avec le traditionnel "C'est quoi la suite" ? 

 

La suite, c'est une embauche imminente ! Ca va être une vraie bouffée d'oxygène de renforcer notre équipe ! Ca va nous permettre de mieux nous organiser, pour bien préparer tout ce qui est à venir. Les envies ne manquent pas, mais on manque encore de moyen, et surtout de temps. En tout cas, c'est une très grosse année WTF ?!, avec pas moins de 6 nouvelles séries prévues… Et j'espère réussir à lancer la version papier de « L'instant Shôjo » pour Japan Expo (le projet traîne depuis 3 ans, pour le moment, on met beaucoup d'énergie dans les vidéos). D'ailleurs, si tout se passe bien, on aura une superbe autrice présente sur le salon, croisons les doigts ! Ca va faire venir beaucoup de monde, c'est certain… Et pour finir, si tout se déroule comme on le souhaite, une nouvelle collection pourrait être lancée dès l'automne… Affaire à suivre…

 

C'est tout pour cette fois mes bichons !! Je remercie infiniment Bruno pour le temps qu'il aura accordé à répondre et pis vive Akata non ?! 

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